À l’heure où la mésinformation et la désinformation font peser une menace croissante sur notre démocratie, il est plus essentiel que jamais que les législateurs et les décideurs politiques se fassent les champions de solutions créatives et immédiates pour prêter main-forte aux salles de nouvelles canadiennes.

Pour les Canadiens, les services privés de radio et de télévision du pays sont la principale source de nouvelles locales et nationales. Les radiodiffuseurs privés consacrent plus de 678 millions de dollars par an au but de soutenir la production des nouvelles, et ils emploient le plus grand nombre de journalistes. Hautement qualifiés, ces journalistes travaillent pendant de nombreuses heures à effectuer de la recherche, à interviewer des sources fiables et à synthétiser toute l’information qu’ils ont recueillie pour en faire des articles et des scénarios de nouvelles professionnels.

Tout ce travail est soutenu par des salles de nouvelles professionnelles qui ont pour mission d’informer leurs communautés, d’ouvrir une fenêtre sur leurs quartiers et de partager avec elles les points de vue locaux sur les événements nationaux et internationaux. Les nouvelles et l’information diffusées par les radiodiffuseurs canadiens étant une ligne de sauvetage essentielle, cette mission prend encore plus d’importance en situation d’urgence ou de crise et lorsque surviennent des questions d’intérêt national.

Mais, si les émissions de nouvelles font partie intégrante de la vie des Canadiens et de notre démocratie, leur soutien financier pose également un défi de taille. Les radiodiffuseurs ont perdu des dizaines de millions de dollars ces dernières années. Leurs revenus publicitaires sont fortement sous pression à cause de plateformes et de services étrangers qui privent de dollars canadiens la tranche de notre économie qui est axée sur nos médias.

Entre-temps, les coûts entraînés par la production et l’acquisition d’émissions de divertissement ne cessent de monter en flèche. Il fut un temps, ces émissions populaires et couronnées de succès aidaient à financer le coût des nouvelles. Cependant, avec l’incursion de colosses étrangers qui continuent à faire rétrécir les marges bénéficiaires des radiodiffuseurs canadiens, leur capacité de financer la production de nouvelles est profondément diminuée.

Nos salles de nouvelles professionnelles à travers le pays se trouveront affaiblies, et en fin de compte non viables, si l’on ne leur apporte pas un soutien urgent.

Pour protéger ces salles de nouvelles si essentielles pour notre démocratie, le gouvernement fédéral doit tenir compte des défis structurels notables auxquels elles font face. Nos entreprises de nouvelles ont perdu la majorité de leurs revenus publicitaires aux géants étrangers de la technologie comme Google et Meta, et il est important d’assurer aux salles de nouvelles radiodiffusées les mêmes moyens de soutien que reçoivent les autres médias dans ce contexte.

Le gouvernement pourrait élargir le crédit d’impôt pour la main-d’œuvre journalistique canadienne pour englober les entreprises de nouvelles radiodiffusées. Cela aurait l’effet de reconnaître que toutes les salles de nouvelles fonctionnent dans notre monde multimédia où les radiodiffuseurs emploient des journalistes pour publier des reportages en format texte sur leurs sites Web, tout comme les médias imprimés présentent du contenu en formats audio et vidéo par le biais de leurs services numériques. Cependant, le maintien du statu quo ne fera que perpétuer la distinction injuste et dépourvue de toute pertinence entre les salles de nouvelles produisant du contenu « imprimé » et celles produisant du contenu « radiodiffusé ».

De plus, le gouvernement pourrait accorder la priorité aux entreprises de nouvelles du Canada en attribuant un pourcentage plus élevé de ses dépenses en publicité à la radio locale, la télévision, les médias imprimés et les médias numériques de propriété canadienne. La publicité est comme l’oxygène pour les entreprises médiatiques canadiennes et cette mesure serait un changement appréciable étant donné que le gouvernement du Canada a privilégié les dépenses sur Google et Facebook/Instagram l’an dernier (23 pour cent) par rapport à la télé (15 pour cent) et la radio (4 pour cent).

Le Canada doit se montrer beaucoup plus éveillé et actif lorsqu’il traite la question de l’état actuel des médias. En quelques années à peine, les géants étrangers du domaine numérique sont passés de l’étape où ils étaient une présence dans notre secteur à celle de joueurs dominants, et ils continuent à retirer des dollars canadiens de notre économie sans soutenir des biens publics vitaux comme nos salles de nouvelles.

Nous savons que la télé et la radio atteignent les Canadiens où ils se trouvent et leur offrent des nouvelles et de l’information de qualité professionnelle dont ils ont tant besoin à un moment où il est davantage difficile de déchiffrer la discordance en ligne. Non seulement cela, mais les radiodiffuseurs sont des centres de liaison, car ils parrainent souvent des initiatives caritatives et des événements communautaires et y participent.

Il est temps que nous commencions à utiliser tous les outils à notre disposition pour contrecarrer les défis de longue date qui nous sont lancés aujourd’hui par le contexte médiatique en évolution rapide, tout particulièrement en ce qui concerne nos entreprises de nouvelles. Il y va de la vitalité de notre démocratie et de nos communautés.

 

Kevin Desjardins est le président de l’Association canadienne des radiodiffuseurs. L’ACR représente les stations de radio et de télévision privées du Canada ainsi que les services de télévision spécialisée.